Situé pour l’essentiel au-delà du 70e parallèle Sud, le continent antarctique, véritable désert de glace, froid et austère, mais d’une beauté fascinante (j’espère vous confirmer cela tout au long de mes billets), est le lieu de tous les extrêmes. Continent le plus élevé de la planète, c’est aussi « le plus froid, le plus venteux, le plus sec et le plus sombre » comme le rappelait Ernest Shackelton. Aussi sec que le Sahara, tantôt plongé dans l’obscurité des nuits polaires, tantôt dans la clarté sans fin du soleil de minuit, ce véritable royaume de glace et de roc est coupé du reste du monde par l’océan Austral qui le ceinture complètement. Il joue enfin un précieux rôle de sentinelle dans le contexte actuel des changements climatiques.
Un désert glacé
Les conditions climatiques qui règnent en Antarctique sont de loin les plus extrêmes de la planète. C’est essentiellement dû à la présence d’une imposante carapace de glace qui recouvre la quasi-totalité du continent blanc! Le volume de cet inlandsis est si considérable qu’il équivaut à environ 90% des glaces présentes sur Terre et 70% des réserves d’eau douce.
Si l’Antarctique venait à fondre complètement, le niveau des mers s’élèverait de près de 70 mètres, engloutissant sous les flots de nombreuses régions du globe. Un tel scénario catastrophe n’est pas pour tout de suite, mais les signaux actuels sont très alarmants et de nombreux travaux montrent que la fonte des glaces de l’Antarctique a commencé et que le processus semble aujourd’hui irréversible,et ce même si les objectifs de l’accord de Paris étaient tenus, ce qui est loin d’être gagné. Ainsi, selon les études, l’Antarctique perd entre 100 Gigatonnes (Gt) à plus de 300 Gt par an. Parce qu’une diminution de 360 Gt/an représente une élévation annuelle du niveau des mers de 1 millimètre (mm) par an, ces estimations récentes laissent apparaître une hausse du niveau des mers de 0,27 mm à 0,83 mm par an en raison seulement de la fonte des glaces de l’Antarctique. Le rythme actuel de la montée des eaux est d’environ 3 mm/an (en constante accélération) et comprend également la fonte de la calotte glaciaire arctique et des glaciers de montagnes ainsi que la dilatation thermique des océans due à leur réchauffement. La fonte des glaces de l’Antarctique pourrait contribuer pour 1 mètre à la fin de ce siècle.
Des records de froid
L’Antarctique apparaît comme la région la plus froide du globe. Les hautes latitudes australes sont le siège d’un climat polaire extrêmement rigoureux et caractérisé par de très longs hivers particulièrement froids et secs. Ce froid hivernal s’explique par la faiblesse du rayonnement solaire à l’approche du pôle Sud, l’importante déperdition de chaleur qui a lieu durant la longue “nuit polaire” de l’hiver austral (près de 80% de l’énergie solaire reçue est réfléchie par la glace) et la présence durant l’hiver d’un fort « vortex polaire », dépression atmosphérique formant une barrière isolant le continent des masses d’air chaud des hautes latitudes.
En conséquence, l’Antarctique constitue la région la plus froide de la planète. Au meilleur de l’année, en saison estivale, la température moyenne au sol s’échelonne de -35°C dans l’intérieur des terres à +5°C dans les régions côtières. Quelques mois plus tard, au sommet de l’hiver, le thermomètre plonge à -35°C sur le littoral (notamment à Dumont d’Urville) et jusqu’à -80°C voire moins au centre de l’inlandsis. L’Antarctique détient ainsi le record absolu de froid avec un minimum de -93,2°C, enregistré par satellite le 10 Août 2010. Le record mesuré dans une base du continent est de -89,3°C à la base russe de Vostok en 1983.
Cet air froid présent en Antarctique est toujours très sec ; les précipitations, presque exclusivement solides (sous forme de paillettes de glace scintillant au soleil) sont très réduites. Elles se concentrent essentiellement sur les côtes alors qu’au cœur de l’inlandsis, la vapeur d’eau est presque inexistante. Les précipitations restent inférieures à 50mm/an sur une bonne partie du territoire. Ainsi, avec son climat qualifié de quasi désertique, ce continent figure parmi les régions les plus arides du globe. L’ouest de l’Antarctique et en particulier la Péninsule, bénéficie de davantage de précipitations.
Des vents extrêmement violents
L’hiver, un vaste anticyclone (centre de hautes pressions d’origine thermique en raison du froid intense présent en surface) se positionne sur l’Antarctique. Cette imposante masse d’air froid est caractérisée par un air dense et sec qui tourbillonne sur lui-même. A cet anticyclone de surface correspond une dépression en altitude (zone de basses pressions). L’ensemble forme une structure appelée vortex, typique des régions polaires et qui s’étend jusque dans la stratosphère. En période hivernale, au cours des nuits claires et sans nuage, la déperdition de chaleur au niveau du sol est très importante. Une inversion de température peut donc se mettre en place en surface : les températures y sont plus froides qu’en altitude.
Dans un premier temps, cet air glacial, particulièrement dense, est véritablement piégé dans les basses couches, à proximité du sol. Rapidement, cet air froid se met à suivre la topographie du terrain, dévalant ainsi les pentes en s’accélérant depuis le centre de l’inlandsis vers la périphérie. On parle alors de vents de gravité, également appelés vents catabatiques s’ils prennent un caractère particulièrement violent, comme c’est le plus souvent le cas en Antarctique. En débouchant sur le littoral, les rafales atteignent des vitesses record qui dépassent fréquemment les 200km/h et ceci parfois pendant plusieurs jours. Le record absolu de vent a été détenu par la station météorologique du Cap Denison en Terre George V, avec une pointe mesurée à 329 km/h (à Dumont d’Urville, une pointe à été enregistrée à 320 km/h). Ces vents extrêmes compliquent les activités humaines en Antarctique mais facilitent l’accès aux bases littorales en contribuant à disloquer la banquise à la sortie de l’hiver.